« L’art poétique n’est pas nécessairement porteur de succès. Pour autant, il est un vecteur éternel d’émotions, qui fait rire et pleurer, réfléchir et rêver, qui élève, libère et console »
L'annonce d'une anthologie sur Rimbaud et Verlaine lancée par les éditions Thierry Sajat, il n'en fallait pas plus à notre poétesse varoise pour rejoindre les cercles poétiques parisiens. En 2024, elle décide de « libérer ses poèmes qui se sentaient à l’étroit dans ses cahiers ».
C'est ainsi que la société des Poètes Français lui décerne en 2024 le prix Campion-Guillaumet pour son recueil « Flèches » (en cours de publication). La même année, elle est lauréate du second prix « Poesia & Poésie » décerné par l’Association de Littérature et de Poésie des deux Savoie. Au regard de diverses distinctions en concours, on retrouve ses textes dans les anthologies « Murmures sous le Pont des Consuls » 2024 et 2025, les Miscellanées 2025 « Paroles Vives », ou encore l’anthologie 2024 du « Prix International Arthur Rimbaud ». Et bien sûr dans l'Albatros.
D’origine varoise, Béatrice VANUXEM a suivi des études de biologie avant d’évoluer dans le domaine de la santé. Son enfance bercée par les poètes maudits a laissé des traces indélébiles dans son attachement à la poésie rimée. Elle cultive le goût des mots, recherchant en permanence l’alchimie de leur lumière et de leur musique. Son intérêt pour l’étoffe humaine la pousse à décrypter le monde extérieur et la sphère intime avec le tempérament d’une femme libre et passionnée.
Convenances
Je suis conforme à moi sans autre convenance
Que le rire qui tue l’ennui du mauvais jour,
Que ma main qui survole en parfaite insouciance
L’univers d’une peau au prétexte d’amour.
Je suis conforme à moi sans aucun formalisme,
Vivant comme un oiseau au gré de son printemps,
Cherchant le meilleur vent pour son métabolisme
Et se moquant pas mal du hasard des courants.
Je regarde passer les leçons de principe,
Une deux trois, tend les doigts, je frapperai dessus,
Je vous laisse les mots et les stéréotypes
De vos pieux arguments… Adieu, tristes vertus !
Départ
L’étoile gonflée d’or protégera ta course,
Aucun bruit. Tu seras demain au bout du temps.
L’horizon enjoué invite la Grande Ourse
A boire dans son lit frangé de firmament.
La mer est le berceau accueillant dans sa toile
Les tessons du soleil qui s’éteint doucement,
Elle devient miroir et jette sur ta voile
Le souffle de la nuit en éclats de diamant.
L’air est doux à mourir, salé comme un remords
Quand l’étoile-flambeau t’escorte loin du port
Et que des rides bleues tissent un plaid luisant,
Tu pars ! Accompagné par l’ombre des géants.
Tu glisses sur le fil du courant qui ondoie,
Aucun bruit. Tu seras demain au bout de toi.
Rupture
En amour bien souvent notre mémoire est prompte
A ne se rappeler que du pire moment,
De l’ultime regard que l’on croise en pleurant
Ou du dernier baiser pour solde de tout compte ;
Le drap froissé devient le témoin historique
Des ébats sacrifiés sur l’autel de l’adieu,
L’insomnie prend son quart, nous donnant peu à peu
La mine et le moral d’un pantin anémique
Traquant un vieux flacon qui traîne quelque part,
Un objet oublié confirmant un départ …
Tout nous rappelle en vain la douleur de l’absence !
On croit mourir cent fois mais l’on reste debout,
Cloué au pilori de la désespérance
Et d’un chagrin gluant, plus sombre que l’égout.
L’éponge
Mon cœur en éponge,
Détrempé d’amour,
S’entortille autour
Du mal qui le ronge.
De cet essorage
Dans le caniveau
Ruisselle l’écho
De larmes sans âge ;
Errant dans la bruine
C’est l’heure où rumine
L’illusion perdue,
Falote cousine
Cachée dans la ruine
De l’espoir qui tue.
Naissance
Grise de nuit, voici la plume
Recherchant le mot endormi
Qui viendra glisser dans l’écrit
Sa perle conjuguée de brume ;
A l’heure où l’émotion s’allume
Chaque ligne tresse une vie
Poudrée de rêve et d’insomnie
Qui chemine en robe d’écume ;
Dès que l’expression vagabonde
La poésie devient féconde,
Emplie de fièvre et de pudeur,
La pensée danse et cabriole
Quand l’espoir, tel une luciole
Brille en alignement du cœur.