Jeux de vers et de rimes
Atelier d’écriture de poésie classique et néo-classique
du 13 avril 20242024
Thème le rondeau
Le rondeau est un poème chanté à forme fixe, composé de treize vers en octosyllabes ou décasyllabes, entièrement construit sur deux rimes. Selon la variante du rondeau, on trouve des tercets, quatrains ou quintils, avec des rimes pouvant être embrassées ou croisées.
Comme nous le voyons dans le texte qui suit, qui est la forme du rondeau la plus représentée, le principe de ce poème est le suivant : le premier vers se répète, tel un refrain, à la fin de la deuxième et de la troisième strophe.
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
Il n'y a bête ni oiseau
Qu'en son jargon ne chante ou crie :
« Le temps a laissé son manteau !
De vent, de froidure et de pluie, »
Rivière, fontaine et ruisseau
Portent, en livrée jolie,
Gouttes d'argent, d'orfèvrerie ;
Chacun s'habille de nouveau.
Le temps a laissé son manteau
Charles d’Orléans, Le Printemps
Le rondeau doit comporter seulement deux rimes, des rimes masculines et féminines. (à l’époque de Charles d’Orléans, le e en fin de vers se prononçait).
Au XVe siècle, le rondeau simple bascule vers le rondeau nouveau, appelé aussi rondeau double ou rondel, dans lequel le refrain apparaît à plusieurs reprises au milieu de trois strophes isométriques. Le rondeau a souvent pour thème principal l’amour, les joies et les peines. Composé de treize vers (sans le refrain), le rondeau dit « rondeau nouveau » ou « rondeau commun » est structuré de la manière suivante :
Ma foi, c'est fait de moi. Car Isabeau
M'a conjuré de lui faire un rondeau.
Cela me met en une peine extrême.
Quoi treize vers : huit en eau, cinq en ème !
Je lui ferais aussitôt un bateau.
En voilà cinq pourtant en un monceau.
Faisons-en huit, en invoquant Brodeau,
Et puis mettons : par quelque stratagème.
Ma foi, c'est fait.
Si je pouvais encor de mon cerveau
Tirer cinq vers, l'ouvrage serait beau.
Mais cependant je suis dedans l'onzième,
Et si, je crois que je fais le douzième.
En voilà treize ajusté au niveau.
Ma foi, c'est fait !
Vincent Voiture, Ma foi, c’est fait de moi…
Qu'un vain scrupule à ma flamme s'oppose,
Je ne le puis souffrir aucunement,
Bien que chacun en murmure et nous glose;
Et c'est assez pour perdre votre amant.
Si j'avais bruit de mauvais garnement,
Vous me pourriez bannir à juste cause;
Ne l'ayant point, c'est sans nul fondement
Qu'un vain scrupule à ma flamme s'oppose.
Que vous m'aimiez, c'est pour moi lettre close;
Voire on dirait que quelque changement
A m'alléguer des raisons vous dispose:
Je ne le puis souffrir aucunement.
Bien moins pourrais vous conter mon tourment,
N'ayant pas mis au contrat cette clause;
Toujours ferai l'amour ouvertement,
Bien que chacun en murmure et nous glose.
Ainsi s'aimer est plus doux qu'eau de rose:
Souffrez-le donc, Philis, car, autrement,
Loin de vos yeux je vais faire une pose,
Et c'est assez pour perdre votre amant.
Pourriez-vous voir ce triste éloignement?
De vos faveurs doublez plutôt la dose.
Amour ne veut tant de raisonnement:
Ce point d'honneur, ma foi, n'est autre chose
Qu'un vain scrupule.
Jean de La Fontaine, Rondeau redoublé