Après dix ans d’absence, François de Malherbe retrouve les siens mais le différent né des options religieuses ne s’est pas effacé pour autant. Lui qui pensait récupérer 1 200 écus en sa qualité d’aîné en reprenant la charge paternelle (qu’il avait refusée) en est tout marri. C’est son frère Eléazar qui en hérite. Une nouvelle en provenance d’Aix le secoue : la mort du Grand Prieur. Son épouse le rejoint en Normandie et laisse la gestion de sa dot à des amis aixois. Selon la loi des ennuis maximum, il ne voit pas la couleur des intérêts. Il est condamné à emprunter de l’argent pour survivre. Il y a urgence à rejoindre la cour. Soutenu par ses amis Du Perron et Bertaut, il met la dernière main aux Larmes de Saint Pierre, dédiées au roi et part pour Paris en mars 1587 alors que Marie Stuart vient d’être exécutée. Henri III gratifie l’auteur de 300 écus . Nouvelle déception pour le poète qui doit emprunter 600 écus pour joindre les deux bouts.
De retour à Caen, il doit faire face à une terrible nouvelle : la mort de son fils en 1587. Désabusé, il se tourne vers le milieu qui est le sien : les lettrés (universitaires et magistrats). Son épouse le rejoint en Normandie où naîtra la petite Jourdaine qui sera emportée par la peste à l’âge de douze ans. Le poète ressent un profond accablement comme en témoigne l’extrait de la lettre de consolation qu’il adresse à son épouse :
« Je m’étais proposé de vous consoler, mais comment le ferais-je,désolé comme je suis. Ce qui donnait à mon âme des atteintes plus vives et plus sensibles, c’est que vous n’étiez pas avec moi pour m’aider à pleurer à mon aise, sachant bien que vous seule qui m’égalez en intérêt, pouviez m’égaler en affliction »
La France est en proie à de violentes perturbations avec entre autre l’assassinat du duc de Guise, lors des États généraux de Blois puis celui d’Henri III auquel succède Henri IV. Le 31 juillet 1593, Henri IV se convertit au catholicisme. Chez les Malherbe, les questions politiques divisent toujours. Lassée, la femme du poète repart à Aix en Provence. Seul à Caen, il décide de jouer la carte locale. Le 23 février 1594, il est élu échevin. Au printemps 1595, Monsieur le Maire de Caen change de cap et reprend la route pour Aix en Provence.
Abjuration d'Henri IV le 25 juillet 1593 en la basilique de Saint-Denis - Nicolas Baullery - source Wikipedia