Entrée des femmes dans la vie littéraire. Le Moyen Age avait connu de nombreuses femmes écrivaines renommées, telle que la vénitienne Christine de Pizan (1364-1431). Au XVème siècle, elle fut la première à objecter qu’il aurait suffi d’envoyer les filles à l’école pour que leur intelligence puisse se développer à l’égal de celle des garçons.
A partir de 1497, date de parution de l’œuvre posthume de Christine de Pizan, Le Trésor de la cité des dames, un petit groupe de femmes écrivaines partageait le projet de contester le monopole quasi exclusif des hommes sur la littérature et de prendre la parole pour discourir ouvertement de soi, de ses gouts, de ses sentiments, de ses aspirations les plus profondes.
Des femmes donc qui se sont imposées dans la société de leur temps car fortes de leurs ambitions, de leur intelligence, de leur beauté ont réussi, en dépit des préjugés masculin à profiter de circonstances favorables et à se faire valoir. Jamais pourtant ces femmes assument le pouvoir en leur nom, car l’autorité appartient aux hommes. L’Histoire reste apanage officiel des hommes car il fallait se créer des alliés puissants, distribuer des faveurs, séduire, corrompre, voir punir pour sortir de scène.
Après Christine de Pizan, Marguerite de Navarre (Angoulême, 11 avril 1492 - 21 décembre 1549), s’inscrit pleinement dans cet essor de grandes princesses qui donnent l’exemple en prenant la plume.
Première poétesse française à être publiée (sans oublier avant elle Marie de France1, 1160-1210, première femme de lettres en Occident à écrire en langue vulgaire), Marguerite de Navarre est décrite ainsi par le poète Charles de Sainte-Marthe dans son « Oraison funèbre de l’incomparable Marguerite » : « Quand elle se trouvait seule en sa chambre, tu l’eusses vue tenir entre ses mains un livre au lieu de la quenouille, une plume au lieu du fuseau et la touche de ses tablettes au lieu de l’aiguille ».
Marguerite de Navarre, aussi connue comme Marguerite d’Angoulême, Duchesse d’Alençon, puis reine de Navarre grâce à son deuxième mariage avec le roi Henry II de Navarre, préférait les livres à la quenouille et la plume au fuseau. Elle savait faire valoir ses idées.
Personnage capital de la Renaissance, femme d’exception, elle a vécu cachée dans l’ombre de son frère, François Ier, prince de la Renaissance et puissant souverain européen de 1515 à 1547, celui qui dans son château à Amboise, transformé en atelier et en résidence d’artiste, avait reçu Léonard de Vinci jusqu’à sa mort, le 2 mai 1519.
Passée à la postérité pour son œuvre Heptaméron, un recueil inachevé de 72 nouvelles dont le récit se déroule sur sept journées (la huitième étant incomplète), proche pour sa structure de son modèle italien le Décaméron de Boccace, l’œuvre poétique de Marguerite de Navarre commence en 1524 et s’achève en 1549.
1 Philippe Walter, Lais du Moyen Age. Récits de Marie de France et d’autres auteurs (XII – XIII siècle), Paris, La Pléiade Gallimard, 2018.